
« Ghar E’Zemma, nous sommes désolés. »
C’est avec une douleur incommensurable que nous écrivons ces lignes. La grotte de Rar E’Zemma, ce sanctuaire millénaire qui portait sur ses parois les voix gravées de nos ancêtres, n’est plus. Elle a été engloutie, réduite en poussière par un bris roches des carrières à ciel ouvert avoisinante, effacée par l’indifférence criminelle de ceux qui auraient dû la protéger.
Nous pleurons un pan entier de notre mémoire collective. Mais au-delà des larmes, c’est la colère qui nous étreint. Car ce drame n’était pas inévitable : nous avons alerté, nous avons supplié, nous avons multiplié les appels aux autorités, aux institutions et aux associations ! Nous avons frappé à toutes les portes. En vain.
Le silence des responsables, leur inertie coupable, ont permis cette destruction. Et ce qui nous blesse davantage encore, c’est la trahison de ceux qui se disent « défenseurs du patrimoine » mais qui, dans l’ombre, nous ont combattus. Ces associations, que nous pensions être nos alliées, se sont révélées être les fossoyeuses de la mémoire qu’elles prétendaient protéger. Elles ont préféré leurs petits intérêts, leurs querelles stériles, leur soif de reconnaissance, plutôt que de se tenir aux côtés d’une cause juste et universelle.
Aujourd’hui, que leur restera-t-il à défendre, sinon leur vide et leur hypocrisie ?
Ghar E’Zemma n’est plus, et avec elle disparaît un témoignage unique de notre histoire antique. Là où se dressaient des inscriptions romaines mystérieuses, il ne reste Qu’un tas de roches, des gravats et l’écho assourdissant du néant. Ce que la pluie, le temps et les siècles avaient épargné, l’homme l’a anéanti en quelques heures, sous le regard impassible des autorités.
Nous ne pardonnerons pas. Nous n’oublierons pas.
À toi, Ghar E’Zemma, nous présentons nos condoléances comme on le fait à une amie assassinée sous nos yeux. Pardonne-nous de n’avoir pas pu te sauver. Nous avons tenté, mais la cupidité, l’ignorance et la lâcheté étaient plus fortes que notre courage.
À ceux qui portent cette responsabilité — responsables politiques, administratifs, carriers, et fausses associations — sachez que vous êtes comptables devant l’Histoire. Vous avez du sang sur les mains : celui de notre patrimoine, celui de notre identité.
Un jour, vos noms seront oubliés. Mais le crime que vous avez laissé commettre restera gravé dans la mémoire de ceux qui savent encore ce que veut dire « défendre une nation ».